CONGRÈS DÉPARTEMENTAL DES MAIRES À MANOSQUE
Voici l’intégralité de mon discours prononcé ce jeudi à Manosque lors du Congrès départemental des Maires organisé par l’AMF 04 dont j’ai l’honneur d’être le président. Un congrès où j’ai eu le plaisir d’accueillir David LISNARD, président national de l’AMF et Renaud MUSELIER, président de la Région Sud aux côtés de nombreuses autres personnalités parmi lesquels le sénateur (en début de matinée avant de se rendre à Paris au Sénat), les deux députés des Alpes de Haute-Provence et la présidente du Conseil départemental, sans oublier le préfet des Alpes de Haute-Provence.
« Permettez-moi d’abord de remercier chaleureusement notre collègue Camille GALTIER, maire de Manosque, qui nous met gracieusement à disposition cette très belle salle OSCO MANOSCO très fonctionnelle et très bien équipée. L’organisation de ce congrès par Provence Média est toujours aussi efficace, notamment avec le salon des professionnels, si important pour nos territoires communaux. Mes remerciements vont d’ailleurs aux services techniques de la ville de Manosque ainsi qu’à la directrice de notre association Laurence ANGELVIN.
J’en profite pour féliciter Camille GALTIER qui, obtient des résultats plus qu’encourageants dans la ville la plus peuplée du département et qui n’est certainement pas la plus facile à administrer. Mes remerciements vont aussi à notre président, Monsieur David LISNARD, qui nous fait l’honneur d’assister à nos débats. Sachez Monsieur le président, que nous sommes très sensibles à votre présence et que c’est un grand honneur de vous accueillir parmi nous. Vous avez certainement beaucoup de choses à nous dire et de notre côté, avons aussi plusieurs interrogations à vous soumettre, vous vous en doutez bien ! Nous ne pouvions espérer meilleur président, au regard de la façon dont vous gérez la ville de Cannes. Je voudrais en profiter également pour remercier l’ensemble des services de l’AMF et de Mairie 2000, dont la directrice Nathalie DOTRÈS est également présente.
Mes remerciements vont aussi bien sûr à Renaud MUSELIER, président de la Région Sud ainsi qu’à David GÉHANT, vice-président qui n’a pu être parmi nous aujourd’hui et qui m’a chargé de l’excuser, mais aussi à Jean-Charles BORGHINI, conseiller régional, pour sa présence toujours très active sur le terrain. Cher Renaud, nous nous connaissons depuis longtemps et l’amour que nous partageons toi et moi pour l’Ubaye ne doit pas nous faire oublier les problèmes que les maires de ce département rencontrent. Je sais que tu interviens aussi souvent que tu le peux pour tenter de les résoudre et je t’en suis, comme tu le sais, très reconnaissant. La Région, depuis que tu la présides, est beaucoup plus proche des collectivités. Tu as toujours une oreille très attentive, surtout lorsqu’il s’agit de les aider à financer leurs projets. Je te remercie également pour la participation de 20 000 euros que tu accordes chaque année aux associations des Maires de la région. Sans cette aide précieuse nous ne serions pas là aujourd’hui !
J’observe que ce moment de rencontres entre nous, mes chers collègues, est toujours privilégié, car il nous permet d’indiquer aux représentants de l’Etat, et notamment à notre Préfet, sans oublier nos députés, notre sénateur et bien évidemment notre président qui saura les évoquer le mois prochain lors du congrès national à Paris, les sujets qui nous inquiètent et ceux qui nous posent de vrais problèmes.
Je vais me répéter une nouvelle fois, mais je le martèle, tant le sujet est grave : nous n’aurons bientôt plus personne qui voudra se présenter à la tête d’une commune, si les maires continuent à être aussi peu considérés.
Nous ne sommes plus seulement « à portée de gifle » ; la vie des maires et des élus peut aussi être en danger. Menaces de mort, coups de poings, tentative d’incendie de la résidence du maire alors que sa famille était présente à l’intérieur… les faits divers en cette matière sont nombreux et je crois aussi que d’autres sont passés sous silence, même si dans notre département la situation est bien meilleure qu’ailleurs.
On ne peut attendre que déferle dans nos territoires ruraux la violence de Marseille et d’ailleurs. Car nous n’en sommes pas loin ! Je fais confiance au nouveau Procureur de la République, M. Antoine PESME, qui nous fait l’honneur d’être présent aujourd’hui et qui j’en suis persuadé, pour l’avoir rencontré et échangé avec lui, appliquera un dialogue constructif et une concertation permanente. Notamment pour la convention relative à la lutte contre les dépôts sauvages de déchets que la communauté de communes sisteronais-Buëch que je préside a signé avec son prédécesseur et que je souhaiterais étendre à l’ensemble des agglomérations et communautés de communes de notre département.
D’autre part, je demande instamment à notre président national d’exiger un vrai statut de l’élu ; on nous le promet depuis longtemps mais on ne voit toujours rien venir !
Avant d’évoquer les finances, qui sont le nerf de la guerre, je veux évoquer une nouvelle fois les services publics. Nous assistons de nouveau à une déliquescence du service des urgences, et ce, dans les trois grands hôpitaux de notre département. Il est inconcevable que (cela s’étant déjà produit) certains jours et certaines nuits aucun service d’urgence ne soit ouvert, sauf le SMUR, heureusement.
Mes chers collègues, vous avez été nombreux à prendre des arrêtés afin de résoudre ce problème crucial Malheureusement ces arrêtés ne sont pas recevables car il n’est pas possible de mettre l’Etat en demeure… Je voudrais d’ailleurs remercier Patricia GRANET, ma première vice-présidente, pour son implication dans ce dossier en tant que présidente de la conférence territoriale de santé et représentante de l’AMD 04 à la conférence régionale. Les Bas-Alpins paient autant d’impôts que les habitants des grandes villes, voire plus si l’on compte les distances à parcourir : ils n’ont pas les mêmes offres culturelles, ils n’ont pas les mêmes commodités en matière de transport, ils doivent avoir au moins les mêmes droits en matière de santé que les autres, et je constate que ce n’est malheureusement pas le cas !
Et puisque nous évoquons la Santé dans notre département, je souhaitais vous faire part de la signature prochaine, tel que l’a fait au niveau national le président LISNARD, d’une convention entre l’AMF 04 et la Ligue contre le cancer des Alpes de Haute-Provence, dont la présidente est d’ailleurs parmi nous. L’objectif de cette convention locale est d’agir à notre niveau, au cœur de nos territoires, contre cette terrible maladie et plus particulièrement contre les 40% de cancers évitables avec par exemple la mise en place d’actions de sensibilisation, la création d’espaces sans tabac dans nos communes…
Autre problème qui nous tient à cœur dans nos territoires ruraux, est celui de la présence postale. Nous savons tous, mes chers collègues, les carences en la matière dans notre département, et Sandrine COSSERAT, la trésorière de notre association, en sait quelque chose puisqu’elle préside aussi la commission départementale de la présence postale. La situation déjà délicate ne risque pas de s’améliorer lorsque qu’arrivent, depuis l’Hôtel de Matignon, des rumeurs de baisse des dotations dans ce secteur. En effet, les 177 millions d’euros promis à La Poste par le Gouvernement seraient revus à la baisse et ne représenteraient in fine que 50 millions. Inutile de vous faire un dessin mes chers collègues, ce sont les agences postales communales qui en feront les frais ! Monsieur le président LISNARD nous demandons simplement que l’Etat respecte le contrat qu’il a signé avec vous l’an dernier et qui court sur 3 ans, car il en va tout simplement de la survie des agences postales de nos petites communes.
Et puisque nous en sommes au registre des finances, je veux évoquer l’effort de 5 milliards que demanderait le Premier ministre aux 250 plus grosses collectivités, ce qui représenterait 2% de leur budget, afin de combler un déficit de l’Etat qui est de près de 60 milliards, je vous le rappelle…
Mes chers collègues, nous savons bien que cette mesure, même si elle n’affecte pas directement nos budgets, nous en serons tout de même les victimes car nous le ressentirons au niveau d’un ruissellement moins important de nos subventions et comme toujours, ce seront les communes les plus sensibles qui seront affectées, et notamment les communes rurales comme les nôtres ! Et je ne vous parle pas de cette hausse de 4 points des cotisations patronales des employeurs territoriaux prévue par le Gouvernement dans son projet de loi de financement de la sécurité sociale afin de combler le déficit de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ! Pour Sisteron, cette hausse représenterait 180 000 euros sur une année…soit l’équivalent de la création de 8 postes d’agents au moment où l’Etat nous demande d’en supprimer !
D’autre part, et il conviendra de le vérifier, une réduction des crédits d’intervention de l’Agence nationale de la cohésion des territoires serait aussi dans les cartons, ce qui impacterait directement le programme « Petites Villes de Demain » et « Action cœur de ville » !
J’ai entendu le ministre chargé du budget Laurent Saint-Martin, indiquer devant la commission des finances à l’Assemblée nationale, que les dépenses des collectivités territoriales ont été plus élevées que prévu et de l’ordre de 16 milliards d’euros ! En fait, le gouvernement s’est appuyé sur les comptes provisoires des Administrations Publiques Locales (APUL) au 31 juillet dernier pour établir ce chiffre. Je vous rappelle que les APUL regroupent la Fonction publique d’Etat, la Fonction publique territoriale et la Fonction publique hospitalière. Il était établi que la hausse des dépenses de fonctionnement des APUL en 2024 ne devait pas dépasser 1,8% et que celle des dépenses d’investissements devraient se limiter à 7%. Or, au 31 juillet, ces 2 chiffres s’établissent autour de 6% pour le fonctionnement et plus de 10% pour les investissements. Par extrapolation, le gouvernement en a tiré un dépassement de 16 milliards ! En oubliant de mentionner que la hausse de ces dépenses était due en grande partie à la hausse du point d’indice, celle de l’énergie et le déficit des hôpitaux notamment.
La Cour des Comptes nous dit enfin que nous devrions supprimer 100 000 emplois et revenir aux effectifs que nous avions en 2010, soit moins 5%. En tant que maire de Sisteron, je lui dis CHICHE ! Au cours des 10 dernières années, j’ai réussi à supprimer 40 postes, donc revenir à 2010 je suis d’accord ! Mais que tout le monde se rassure, le budget de ma commune n’en a plus les moyens. Sisteron a perdu en 10 ans 25 millions d’euros de dotations soit 4 années d’investissements perdues localement. Mes chers collègues, ceci n’a aucun sens puisque vous le savez aussi bien que moi, les budgets des collectivités locales ne sont jamais en déséquilibre, pas plus en 2024 que les années antérieures.
Mais comme par hasard, ce chiffre est similaire à celui du soi-disant « dérapage » des collectivités et de là à dire que les ponctions sur le budget de l’Etat seraient donc de la faute des collectivités territoriales, il n’y a qu’un pas qui ne sera pas franchi j’espère ! Même si bien sûr nous sommes favorables à participer, en bons démocrates que nous sommes, à la réduction du déficit de la France, mais à notre place et rien qu’à notre place.
Parlons un peu du Fonds Vert si vous le voulez bien. De nombreuses petites villes ont engagé des projets importants au titre de la transition écologique notamment, encouragés qu’elles étaient par l’enveloppe lancée en 2022 et majorée de quelque 2,5 milliards d’euros cette année. Mais l’enthousiasme initial des collectivités locales a pris un sacré coup dans l’aile après que l’on a appris, au vu de documents préparatoires au budget 2025, que cette enveloppe pourrait être amputée de 1,5 milliard ! Qu’en sera-t-il des projets parfois déjà débutés par les communes ? Il faudrait Monsieur le préfet, que vous puissiez rassurer les maires qui se sont déjà engagés dans des projets de rénovation et pour lesquels ils pouvaient prétendre au Fonds Vert…
Les sujets de mécontentements sont nombreux et parmi eux, la mise en œuvre du « Zéro Artificialisation Nette », autrement dit le ZAN, nous préoccupe tout particulièrement. Nous considérons ce dispositif trop contraignant Monsieur le Préfet. Sans compter qu’il convient de l’intégrer dans les SCOT, les PLU, et sans attendre la publication du Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (STRADDET). Encore une fois mes chers collègues, et pour simplifier, ce dispositif tient peu compte des petites communes rurales comme les nôtres. En effet, ce dispositif ZAN est certainement compréhensible dans les grandes villes de la Côte d’Azur où l’on a bétonné à l’excès mais pas dans nos territoires ruraux qui ont besoin de construire. Mieux : comment appliquer la loi NoTRE et son exigence de logements sociaux sous peine de sévères amendes et en même temps, respecter le dispositif ZAN ? Il y a là une équation que pour ma part, je ne sais pas résoudre !
J’ai entendu le Premier ministre qui, dans son discours à l’Assemblée nationale, a indiqué qu’il souhaitait « assouplir » ce dispositif. Il reste donc un peu d’espoir en espérant qu’un certain distinguo soit fait sur le territoire national. On ne peut en effet appliquer la même règle à une métropole sur-bétonnée et à une commune rurale de 1000 habitants, sans prise en compte des efforts passés en la matière ou encore les espaces naturels, forestiers et agricoles qui sont très importants dans nos territoires ruraux ! Toujours en matière de finances, nous faisons un triste constat : les communes, jusqu’ici, avaient la faculté de lever l’impôt afin d’investir et de moderniser. Aujourd’hui après la suppression de la Taxe professionnelle, de la baisse des dotations, de la suppression de la Taxe d’habitation, de la baisse programmée de la Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) jusqu’à son extinction et la baisse du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), il ne reste que la Taxe foncière aux communes. Alors qu’elles aspirent à une réelle autonomie financière, toutes ces mesures font des communes des collectivités de plus en plus « assistées », pour ne pas dire « sous contrôle de l’Etat », et ce n’est pas ce que veulent les élus.
Je ne voudrais pas être trop long mes chers confrères, mais je veux pour finir, souligner ce que bon nombre d’entre vous m’a fait part et que je partage en matière de promotion de leurs agents. Promouvoir un agent est en effet un vrai parcours du combattant, à savoir qu’il y a de nombreux candidats méritants et très peu de promus, à cause d’une règle de quotas que le Centre De Gestion est obligé d’appliquer, malgré lui. Il faut absolument que cette règle des quotas soit revue afin d’apporter plus de souplesse et surtout pouvoir récompenser nos agents les plus méritants, ceux qui s’investissent le plus et qui souvent renoncent à se former pour ne pas pénaliser leur service et leurs collègues pendant leur absence. Sur cette question de la promotion de nos agents, je dis à l’Etat, donnez-nous un peu de liberté, faites-nous confiance !
Voilà mes chers amis ce que je souhaitais dire à nos invités afin que votre voix soit entendue jusqu’à Paris. Je sais bien que la période est loin d’être propice aux réjouissances, eu égard à la dette que la France a accumulée et qui la place au 3ème rang des pays les plus endettés d’Europe après la Grèce et l’Italie. Le gouvernement doit trouver 56 milliards d’euros chaque année pour régler uniquement les intérêts de la dette et ceci représente plus de 800 euros par Français, sans que l’on nous dise d’ailleurs pourquoi et comment nous en sommes arrivés là… Alors certainement, des efforts devront être faits, nous ne serons bien évidemment pas les seuls à les supporter, mais il est indispensable que l’on prenne nos demandes en considération. Les collectivités territoriales sont en effet, grâce à leurs investissements, un des principaux générateurs d’emplois, notamment dans le bâtiment. Il convient de ne pas l’oublier.
N’oublions pas aussi que nous sommes les garants de la démocratie. …. Si lors de la crise du COVID tous les Maires de France n’avaient pas été présents, et parfois seuls dans leur bureau, en contact permanent avec les préfets, les sous-préfets et leurs services comme l’ARS, la gestion de la crise aurait été impossible et la démocratie aurait été mise à mal… De cela nous n’avons eu aucune reconnaissance.
Pour terminer mon propos, je souhaiterais tout d’abord souligner les excellentes relations que j’entretiens en tant que Maire et président de l’association départementale avec M. Marc CHAPPUIS, préfet, et ses services, qui essayent de répondre au quotidien à nos sollicitations.
Je sais que ce n’est pas facile pour eux mais ils le font avec courage et détermination dans un esprit de dialogue permanent et de présence sur le terrain.
Par ailleurs, toujours dans cette volonté d’accompagner au mieux les Maires et ceux plus particulièrement des petites communes, je vous invite chers collègues, à prendre connaissance du guide de l’ingénierie territoriale, réalisé par les services de la préfecture sous l’égide de M. le Préfet. Un outil de pilotage très complet qui vous sera remis dans quelques instants et dont l’objectif est de nous aider à mieux définir nos projets, rechercher des financements et suivre leur réalisation.
Pour tout cela et au nom des Maires je vous dis simplement M. le Préfet : Merci et je demande que l’on vous applaudisse !
Enfin, je voudrais également remercier Eliane BARREILLE, présidente du Conseil Départemental, toujours très proche et à l’écoute des Maires. Merci également Eliane pour la subvention octroyée à notre association depuis ton élection. Toi aussi tu es une présidente, comme Renaud MUSELIER, de terrain et surtout tu nous prouves tous les jours que tu nous apprécies.
Je tiens aussi à remercier notre Sénateur Jean-Yves ROUX, qui, par le mode de son élection, est notre représentant direct auprès de l’Etat et qui le fait très bien. Nous apprécions son implication et sa présence à nos côtés. D’ailleurs il vient de partir pour le Sénat, car cet après-midi sera discuté un amendement qui mettrait fin comme l’a souligné le Premier ministre à la loi qui nous obligeait à transférer la compétence eau et assainissement aux communautés de communes. Je sais que l’on peut compter sur lui !
Je compte aussi sur la pugnacité de nos deux députés qui sauront faire remonter à l’assemblée nationale nos revendications.
Merci également aux sous-préfets et sous-préfètes, aux directeurs des services départementaux de l’Etat et aux services du conseil départemental, mais aussi à la gendarmerie, à la police nationale et aux sapeurs-pompiers qui veillent tout au long de l’année sur notre sécurité.
Soyons malgré le contexte politique difficile plein d’espoirs pour l’avenir car la France, notre France, est un grand pays qui saura se relever et je fais confiance aux hommes et aux femmes qui nous gouvernent pour relever ce défi.
Vive les Maires de France ! Vive La France ! »