SISTERON, BLOTTIE ENTRE LA CITADELLE ET LA DURANCE
Sisteron (Alpes-de-Haute-Provence). Chaque mardi, une étape de la célèbre route Napoléon. De la Côte d’Azur à Grenoble, un voyage historique à travers des paysages de vacances.
Route Napoléon 5/8
Après Digne, on quitte les routes de montagne pour longer la Durance, au fond de la vallée. Il y a deux cents ans, la différence était encore plus palpable, du sentier escarpé à la route carrossée. La troupe impériale s’était alors divisée en trois groupes, avec au centre l’Empereur, l’état-major et le trésor.
« Napoléon s’y est arrêté. Pourquoi pas vous ? »
La première halte se fera à Malijai, un charmant village provençal d’un millier d’habitants. Dès l’entrée, un panneau annonce : « Napoléon s’y est arrêté. Pourquoi pas vous ? » Les touristes n’ont aucun mal à trouver le lieu de la villégiature impériale, devenu aujourd’hui la mairie (voir encadré). Le parc, situé à l’arrière a servi de bivouac aux militaires, et mérite une halte, avec ses buis taillés en volutes.
En mars 1815, c’était le château de la famille Noguier, qui l’avait acheté en 1759, venant de Marseille. Dans son récit, Édouard Noguier, le petit-fils de l’acquéreur, racontera sa rencontre avec l’Empereur, et son souci de causer des tracas à son hôte d’un soir : « Je vous occasionne du dérangement, vous allez avoir de la besogne… »
« Bonaparte ne s’était pas couché. Il avait passé la nuit dans un fauteuil. À six heures du matin, il descendit l’escalier avec précipitation, s’arrêta un moment sur la porte et parut étonné de voir tous les habitants du village rassemblés sur la place devant le château, dans un profond silence […]. Il reprit un visage serein, monta à cheval et partit pour Sisteron. »
Sisteron est construite au pied de la Durance, et à l’ombre de sa citadelle. Depuis l’Antiquité, ce rocher dominant a été fortifié. Mais on doit l’ouvrage tel qu’on le connaît à Jehan Erard, ingénieur militaire de Henri IV, et bien sûr, à Vauban, à qui l’on doit la Poudrière. Du haut de cet édifice, la vue est saisissante, sur des dizaines de kilomètres.
En franchissant la Durance, Napoléon s’écrit « Soldats, nous sommes à Paris ! ». La troupe impériale profite de sa halte à Sisteron pour tenter de convaincre les anciens soldats des guerres napoléoniennes de les rejoindre, et de faire la route avec eux.
Napoléon sitôt parti, les officiels royalistes se réunissent, sous la direction du général Miollis. On évoque une arrestation imminente, des stratégies à suivre, une retraite impériale à couper, qui pourrait repasser par Sisteron… Mais l’Empereur continue sa route. Il longe la Durance quasiment jusqu’à Gap. C’est la fin de la Provence et l’entrée dans le Dauphiné, une région que l’on appelait autrefois les Basses Alpes, et dont Jean Giono disait : « On s’aperçoit d’abord que ces Basses Alpes ne sont pas si basses. Elles participent à la fois des gloires de la Provence et de la noblesse des montagnes. »
Thierry Meissirel
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