Rassemblement œcuménique devant la cathédrale de Sisteron en hommage au père Jacques Hamel sauvagement assassiné par des barbares mardi. Daniel Spagnou et le père Gilbert Marijsse ont déposé un bouquet de fleurs et allumé un cierge en souvenir de ce prêtre martyr.
Hommage après attentat St-Etienne du Bauvray
le 28 juillet 2016 devant la cathédrale
« Merci à tous d’être là. Merci à M. le Maire, les élus, police municipale et gendarmerie à qui je voudrais particulièrement exprimer notre estime et reconnaissance, à vous tous et particulièrement aussi aux représentants de la communauté musulmane. Nous sommes tous les représentants de tous les habitants de notre cité et de l’humanité toute entière.
Il y a un peu plus d’une semaine, nous étions ensemble devant la mairie suite à l’horreur du 14 juillet où M. le Maire nous a invités à applaudir les « forces de vie » – un moment très fort ! Entretemps les forces de mort ont à nouveau frappé.
Oui, la grandeur de l’homme c’est de donner la vie et de faire grandir la vie. Ceux qui se laissent avilir à devenir des acteurs de mort et de terreur, non seulement perdent leur propre humanité, mais blessent l’humanité tout entière !
Si nous sommes ici devant la cathédrale, c’est bien sûr parce que le dernier attentat a eu lieu dans une église catholique. Mais avant un temps de prière à l’intérieur pour ceux qui le désirent, nous nous trouvons d’abord sur la place publique pour deux raisons :
– D’abord parce que le p. Jacques Hamel et les autres victimes, blessées et meurtries, sont des citoyens français, des hommes et des femmes comme chacun de nous, faisant partie de notre pays. Dans ces horreurs nous sommes tous touchés !
– Ensuite parce que les attentats répétées touchent successivement symboliquement ce qui nous est le plus cher : la liberté d’expression (Charlie), les forces de l’ordre (couple de gendarmes…), la liberté de faire la fête (Bataclan), la liberté de vivre avec nos différences culturelles (hyper kacher), la fête nationale (Nice) et aujourd’hui c’est la laïcité et la liberté de conscience qui est attaquée !
En effet, la laïcité est une belle et grande valeur – malheureusement encore souvent mal comprise. C’est l’espace de la liberté de conscience pour un véritable « vivre ensemble » avec nos différences personnelles, culturelles, religieuses !
C’est l’inverse de l’exclusion, de l’opposition, de s’imposer les uns sur les autres, quelles que soient nos différences d’opinion, de conviction, de culture, de religion – pour ouvrir à la rencontre, au dialogue, à la connaissance et l’enrichissement mutuel.
Le récit mythologique de Caïn et Abel (de la Bible) qui est bien connu au-delà des croyants judéo-chrétiens, dit justement le drame de tous les temps, de l’homme qui refuse l’altérité, la rencontre, la fraternité. Ce refus finit toujours par tuer l’autre différent de moi. Là où l’homme ne devient vraiment homme que dans la rencontre avec l’autre, parce qu’il est autre !
Le grand philosophe Emmanuel Lévinas, d’origine juive, dit que l’homme ne devient homme que dans la mesure où il reconnaît dans le visage de l’autre, un autre moi, comme moi et pourtant autre de qui j’ai à recevoir et à qui je peux apporter.
Dans le Coran il y a une sourate qui dit : « celui qui tue un homme, tue l’humanité. Celui qui fait vivre quelqu’un, fait vivre l’humanité ».
Je viens d’entendre que le p. Jacques Hamel s’est toute sa vie investi dans la rencontre interreligieuse, particulièrement avec les communautés musulmanes. Je ne sais si cela a un lien avec l’attentat.
Puisse ce malheur, chers amis, avoir comme conséquence que chacun d’entre nous se sente plus que jamais stimulé à aller à la rencontre de l’autre, à connaître l’autre, à s’enrichir les uns les autres de nos différences.
Chacun a son histoire, ses convictions, ses expériences – quelle que soit son appartenance ou pas à une communauté religieuse. Mais tous nous avons tant à recevoir, tant à donner pour un « vivre ensemble » qui construit la paix et le bonheur de tous.
Que cette rencontre ce soir nous y engage tous pour rendre notre monde meilleur. Merci ! »
Gilbert Marijsse